La visualisation, ou comment se muscler depuis son canapé
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La visualisation, ou comment se muscler depuis son canapé

Dans un monde idéal, nous pourrions nous téléporter à Charenton 30 minutes avant les partiels depuis notre salon, avoir de vraies pauses déjeuner à Dauphine, ou encore ne pas avoir de personnes qui utilisent les ascenseurs pour aller au premier étage à 8h30. Les études en neurosciences n’ont malheureusement pas trouvé de solutions à ces problèmes, mais ont néanmoins débouché sur certaines découvertes qui pourraient intéresser les plus occupés ou fainéants d’entre nous : et si vous pouviez développer votre masse musculaire rien qu’en vous imaginant faire du sport ?

Si cette promesse ressemble à une des publicités douteuses qui apparaissent lorsque vous désactivez AdBlock, il s’agit d’un sujet de recherche sur lequel se sont réellement penchées les neurosciences. Le concept clef ici est celui de la visualisation, ou « motor visualisation ». Par « motor visualisation » est entendu le fait pour un individu de se visualiser en train de faire un mouvement physique au plus haut de ses capacités ou en dépassant celles-ci.

Quelques études sur la visualisation

En 1992, une étude a montré que la pratique de la visualisation a résulté en un accroissement de la force physique à un niveau comparable à celui d’exercices réels (Yue et Cole, 1992). A l’issue de quatre semaines d’expérience, les participants s’étant physiquement entraînés ont vu la force de leur petit doigt augmenter de 29,8%, contre 22% dans le cas de la visualisation (3,7% pour le groupe contrôle). Le gain de force musculaire permis par la visualisation semble cependant diminuer lorsque la taille des muscles devient plus importante : 13,5% pour la flexion du coude (Ranganathan et al., 2004).

Mais dans le cas d’une impossibilité d’exercice physique comme lors d’une immobilisation avec plâtre, la pratique de la visualisation permet de limiter la perte de force musculaire (Clark et al., 2014). Dans une étude menée aux Pays-Bas, les participants se sont fait immobiliser leur poignet pendant quatre semaines. La moitié d’entre eux a eu recours à la visualisation cinq fois par semaine à raison de 10 minutes par session, tandis que l’autre moitié restait passive. Les résultats sont frappants : le groupe passif a vu une diminution de 45,1% de la force musculaire du poignet, alors qu’il ne s’agissait que de 23,2% pour l’autre groupe. La visualisation a donc permis de presque diviser par deux la perte de force. Ceci soutient l’idée selon laquelle le cerveau est un déterminant majeur de la force physique.

Le « mastermind » de la force physique

Les études neuroscientifiques montrent que la visualisation d’un exercice physique, ou maximal isometric contraction (IMC), active les mêmes circuits neuronaux stimulés lors d’exercices réels, ou maximal voluntary contraction (MVC). Ainsi, les gains de forces observés lors d’IMC s’expliquent par le maintien et le renforcement des circuits neuronaux concernés. Une étude a également démontré l’amélioration dans l’exécution de mouvements physiques en lien avec l’intégration de la pratique de la visualisation dans les programmes d’entraînements d’athlètes (Hynes et Turner, 2020). L’IMC est particulièrement efficace pour augmenter la vitesse d’exécution et l’explosivité musculaire. Mais cette dernière étude observe que plus le nombre de muscles mobilisés par l’exercice imaginé est important, moins la visualisation permet d’augmenter la force musculaire.

La visualisation : pratique et mode d’emploi

La visualisation d’exercices physiques est une pratique connue auprès des athlètes de haut niveau comme Simone Biles ou Astrid Guyart, toutes deux médaillées olympiques. L’IMC est souvent utilisée par les sportifs pour pouvoir s’entraîner sans fatiguer leurs muscles, mais également lorsqu’ils ont des blessures afin de pouvoir revenir à une performance optimale plus rapidement.

Il est à noter que la visualisation a tout à fait sa place dans la pratique physique du commun des mortels. Les études préconisent une durée allant de 15 à 20 minutes par session d’IMC. Aucune activité physique ne doit être réalisée pendant les sessions. D’autre part, les bénéfices de l’IMC sur la force musculaire sont meilleurs lorsque la visualisation est détaillée (Reiser et al., 2011). Pourquoi ne pas commencer par vous imaginer faire des tractions dans la queue du CROUS ?

By La Plume, Dauphine

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