Comment les biais cognitifs déforment notre réalité ?

Comment les biais cognitifs déforment notre réalité ?

Notre quotidien regorge de moments où logique et rationalité s’inclinent face à des actions sans sens immédiat. Quand vous décidez de choisir de ne pas miser sur le numéro 4 à la roulette, car votre voisin vient de gagner avec ce numéro, est-ce vraiment rationnel ? En effet, ce numéro a autant de chance que les autres de remporter la mise une nouvelle fois. Ce raisonnement est dû en partie aux biais cognitifs qui déforment notre réalité. Certains exemples connus montrent à quel point ces biais ne sont pas rationnels. Mais alors quel est l’impact de ces biais cognitifs sur notre vie de tous les jours ? Comment un consommateur peut-il avoir un comportement rationnel ?

Qu’est-ce qu’un biais cognitif ?

Notre cerveau est un organe complexe. Il doit traiter une multitude de données en quelques secondes. Il ne peut donc pas se focaliser sur toutes ces informations, il doit les classer en fonction de leur importance. Il existe des raccourcis cognitifs capables de filtrer les informations en permettant à notre cerveau d’économiser du temps et de l’énergie. Ce sont les biais cognitifs. Ces mécanismes dévient notre perception et notre jugement de la réalité. Ils nous conduisent à porter une attention différente à des faits de même nature. Ils sont donc repérés grâce à l’existence de paradoxe. 

Si j’ai lancé un dé 3 fois et que j’ai obtenu 3 fois le nombre 1, je vais admettre avoir plus de chances de tomber sur un autre nombre la prochaine fois. Or, ce raisonnement est biaisé, j’ai autant de chance de retomber sur le nombre 1. 

L’étude de ces biais fait l’objet de nombreuses recherches en sciences cognitives. Ces travaux ont montré qu’ils étaient présents dans de nombreux domaines : statistiques, logique, perception, causalité, relations sociales … Ces biais ne sont généralement pas conscients. 

A quoi servent-ils ?

Les biais cognitifs sont utiles, car ils permettent une action plus performante. Il est vrai que même s’ils influencent notre jugement, ils nous sont utiles pour prendre des décisions rapidement et sans effort. Leur utilité ? Nous aider à pallier 4 situations ordinaires : le manque de sens, le trop-plein d’information, agir vite et faciliter le processus de mémorisation. Le cerveau doit construire du sens avec les différentes informations à notre disposition, combler les trous et créer la perception du monde qui nous entoure. Il doit être efficace étant donné que l’on doit prendre des décisions en quelques fractions de secondes. Pour cela, il trie les informations pour ne garder que les plus importantes et utiles. Il existerait plus de 200 biais cognitifs. Nous allons ici en détailler quelques uns.

5 biais cognitifs classiques

Un biais cognitif ne peut être comparé à un mensonge, car il est systématique et inconscient, on ne peut l’éviter qu’avec un travail sur soi-même pour avoir conscience de nos réflexes. Nous sommes aveuglés par nos biais cognitifs et seul notre entourage peut s’en rendre compte.

Tout d’abord, l’abstraction sélective est un biais très connu. Il consiste à ne se souvenir que d’un détail d’un événement et l’interpréter hors de son contexte. Par exemple, vous êtes allés à une soirée, mais vous avez perdu votre carte bancaire. Vous vous souviendrez des 2 heures où vous l’avez cherchée partout et vous ne garderez pas un très bon souvenir de cette soirée. Le souvenir négatif prend le dessus sur tout ce qui a pu se passer de positif.

Le biais de confirmation consiste en un biais de jugement, c’est-à-dire croire ce que l’on veut. Il appuie notre tendance à sélectionner des informations confirmant des idées préexistantes. On fait un tri sélectif de manière à garder les hypothèses qui nous arrangent. C’est l’effet bulle des réseaux sociaux, l’algorithme nous propose un contenu similaire à ce que l’on aime déjà. Cela nous laisse dans un cercle d’opinions homogènes. Cependant, quand on se trouve confrontés à des opinions contraires aux nôtres, on a tendance à les rejeter.

L’erreur de Gambler est une erreur de logique. Le Gambler ou le parieur, quand il joue à Pile ou Face et après une série de Pile, va préférer miser sur Face pensant qu’après cette série, lui succédera une série de Face. Cependant, cela est illogique, car il y a autant de chance d’obtenir Pile ou Face. Pour contrer ce biais, il faut se souvenir que le hasard n’a pas d’intention. 

Le mythe de la « main chaude » est également une vision biaisée du hasard. Sa logique veut que si un joueur gagne plusieurs fois de suite, il gagnera aussi au coup suivant. Cependant, la performance à long terme d’un joueur ne dépend pas de ses victoires passées.

Le paradoxe du Monty Hall est une énigme soulevée par un statisticien. Monty Hall était l’animateur d’une émission américaine. Il vous plaçait devant 3 portes fermées derrière lesquelles se trouvaient 2 chèvres et une voiture. Si vous réussissiez à trouver la voiture, vous remportiez ce prix. Pour commencer, vous devez d’abord choisir une porte, disons la porte 1, puis le présentateur vous ouvre l’une des 2 portes derrière laquelle il sait que se trouve une chèvre, ici la porte 2. Finalement, il vous propose de modifier votre choix. Décidez-vous de choisir la porte 3 au lieu de la 1 ? Il ne reste que deux portes soit une probabilité de 50% pour l’une ou l’autre. Par conséquent, vous devriez être indifférent aux choix entre les 2 portes. Vous décidez donc de ne pas changer et de parier sur la porte 1. Avez-vous eu raison ? Non, vous auriez dû saisir l’opportunité de changer pour la porte 3. Ce qui est encore plus paradoxal est que si votre choix initial s’était porté sur la porte 3, il aurait également fallu changer pour la porte 1 pour augmenter vos chances de victoires. Vous êtes sceptique par rapport à ce raisonnement ? Il faut simplement analyser les probabilités. Au départ, vous avez 33% de tomber sur la voiture puis Monty Hall vous ouvre une porte, les probabilités changent et sont à prendre en compte. Cependant, beaucoup de gens ne changent pas leur choix notamment à cause d’autres biais cognitifs comme celui de l’aversion à la dépossession et celui du statu quo, mais aussi par manque d’attention aux probabilités. Vous n’y croyez pas ? Vous pouvez tenter l’expérience avec un jeu de cartes et vous verrez que le joueur utilisant la stratégie de changer de choix gagne deux fois plus que celui conservant son choix initial.

Les biais et les prises de décisions dans la vie de tous les jours

En marketing, les études menées par les spécialistes sous-tendent que les consommateurs sont rationnels. Cependant, cette théorie du marketing classique est mise à mal avec les biais cognitifs. 

Nous avons vu qu’inconsciemment, nous pouvons prendre des décisions illogiques. Mais alors un consommateur peut-il prendre une bonne décision ? Comment est-il en mesure d’avoir une stratégie d’achat s’il n’est pas totalement rationnel ? 

Tous nos achats ne sont pas qu’irrationnels. Il est vrai que certaines décisions le sont, mais nos activités de consommation sont belles et bien dictées par une activité cérébrale consciente. Cependant, on minimise souvent la partie inconsciente. Des études ont été menées dont une, américaine, sur le goût de produits. Les consommateurs associent implicitement que les produits ayant un goût plus plaisant sont pour 66% des produits « mauvais pour la santé ». Pour les consommateurs français, c’est le contraire, 66% des produits sont des produits considérés comme « bons pour la santé ». Ces différences sont bien moins marquées quand on fait le test explicitement entre les deux types de produits. 

Par conséquent il est important que les individus fassent des efforts de réflexion, ces efforts ne sont pas vains. Ils évitent l’impulsivité. De même, l’intelligence collective permet d’être plus sûre de nos décisions. 

Cependant, certains profitent de ces biais cognitifs. Les publicitaires utilisent et exploitent ces biais cognitifs pour faire passer un message souvent fallacieux. En effet, en tant qu’entreprise, une marque aura intérêt à jouer sur ces biais cognitifs pour ne pas heurter les croyances inconscientes des consommateurs par exemple et à faire attention aux associations mentales que nous pouvons faire. 

Elsa Jamin, L2 LSO

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