Un monde bien particulier : le nôtre
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Un monde bien particulier : le nôtre

 

           Qui n’a jamais été interrompu en plein milieu de ses pensées par un brusque claquement de doigts ? Qui n’a jamais été interpellé par son nom, alors que notre esprit cogitait sur un tout autre nom ? Plutôt désagréable, n’est-ce pas ? On entre dans son monde, on ne souhaite pas en ressortir. Mais alors, quels en sont les stéréotypes ? D’où vient ce flux de pensées ? Et quel est son impact sur notre santé mentale ? 

 

Être dans son monde, un comportement souvent dévalorisé à tort

           « Ah, cette personne, elle est un peu dans son monde… ». Que vous évoque cette phrase ? Vous êtes peut-être en train d’imaginer quelqu’un de peu attentif, isolé, ou encore déconnecté de la réalité. Quand un élève regarde par la fenêtre, son professeur le rappelle tout de suite à l’ordre : être dans son monde est souvent synonyme de déconcentration. En réalité, ce n’est pas le cas. Lorsque nous lisons ou travaillons, nous sommes bien dans notre monde, et pourtant, notre concentration est à son apogée. Comme le souligne la revue en ligne PhiloSciences, l’expression « être dans son monde » évoque deux mondes distincts : le Monde avec un grand M, que l’on pourrait qualifier de réel, et le monde subjectif, celui que l’on crée nous-même dans notre tête. Ces deux mondes sont en fait davantage liés que ce que l’on pourrait croire : la plupart du temps, nous pensons intérieurement à des sujets extérieurs. Notre propre monde serait donc complémentaire au « vrai » monde, celui qui nous entoure. L’expression « être dans la lune », synonyme d’« être dans son monde », semble paradoxale, puisque l’on ne se détache pas du vrai monde. Nous pouvons aussi exprimer nos pensées extérieurement, en se parlant à soi-même par exemple. D’ailleurs, si vous recherchez sur Internet « parler tout seul », les premiers résultats suggérés sont « maladie » ou « trouble psychologique ». Soyez rassurés, c’est loin d’être le cas. La vérité, c’est que lorsque nous sommes dans notre monde, nous nous suffisons à nous-mêmes. Nous n’avons pas besoin du contact extérieur pour nous sentir bien. 

 

Que se passe-t-il dans notre cerveau ?

Être dans son monde revient à penser, sans interagir avec son environnement. La pensée est une onde électrique émise dans notre cerveau, lui-même véritable champ magnétique. Lorsque nous sommes dans nos pensées, nous ne sommes pas attentifs à ce qu’il se passe autour de nous. C’est ce que l’on appelle le « vagabondage de l’esprit » ou encore les « sautes d’attention ». Ces deux concepts sont distincts : le « vagabondage de l’esprit », aussi appelé « mindwandering », consiste à penser à autre chose que ce à quoi la réalité nous occupait, alors que les « sautes d’attention », traduites par « mindblanking », ne nous font penser à rien en particulier. On peut qualifier ces dernières de pensées vides. Selon la NeuroSciences Academy, les « sautes d’attention » représenterait la moitié de notre temps passé éveillé ! William James, psychologue américain, compare l’esprit à « un oiseau qui alternerait entre brèves envolées et pauses statiques ». Des tests sur l’attention ont été réalisés à l’aide d’un électroencéphalogramme, permettant de mesurer les ondes du cerveau. Ces études ont montré que lorsque nous sommes dans nos pensées, les ondes enregistrées sont plus lentes, comme lors de notre endormissement. En éveil, c’est ce que l’on appelle un « sommeil local ». 

 

Est-ce bénéfique ?

           Oui, très. Il faut « savoir s’ennuyer ». L’ennui est le meilleur moyen pour laisser libre cours à nos pensées. Selon Erik Dane, professeur spécialiste du comportement organisationnel, « Ce qu’on constate, c’est que notre environnement est rempli d’opportunités, de choses à découvrir, à explorer, mais qu’on ne peut y accéder que si l’on sort de notre pilote automatique, si on se libère de l’emprise de l’agenda, de la succession permanente des tâches à accomplir ». On se pose, des idées naissent, notre créativité se développe, le stress et l’anxiété se réduisent. Se parler à soi-même a également des avantages : remettre ses idées en place, apprendre plus efficacement, et, encore une fois, diminuer le stress. Mais attention : avoir des pensées dévalorisantes, guidées par des émotions négatives, s’avère nuisible. En dehors de cela, soyez dans votre monde ! 

 

La Plume

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