Comment la vague #MeTooGarçons permet-elle de briser l’omerta des violences sexuelles faites aux hommes ?
Source : Médiapart

Comment la vague #MeTooGarçons permet-elle de briser l’omerta des violences sexuelles faites aux hommes ?

À la veille de la cérémonie des Césars, alors que le monde du cinéma se retrouvait déjà secoué par les révélations de Judith Godrèche, l’acteur Aurélien Wiik publie sur Instagram #MeTooGarçons, un premier pas courageux vers une libération de la parole masculine.

 

On estime qu’en France 8 à 20% des victimes d’agressions sexuelles sont des hommes. Cependant, ces chiffres sont soumis à des biais en raison de la stigmatisation sociale entourant la victimisation masculine. Depuis 2017, la lutte contre les violences sexuelles faites aux femmes s’est accélérée grâce à l’apparition des mouvements #MeToo et #BalanceTonPorc. Mais qu’en est-il des agressions subies par les hommes ?

 

Des victimes difficiles à recenser…  

Il existe à ce jour très peu d’études dédiées aux agressions sexuelles subies par les hommes en France. Pour trouver des chiffres récents, il faut fouiller Internet de fond en comble pour finalement arriver à une enquête menée par l’Ined rapportant qu’au cours de leur vie, environ 4% des hommes subissent des violences sexuelles, contre 15% de femmes. Mais ce chiffre reflète-il vraiment la réalité alors même qu’il existe toujours une omerta autour des violences sexuelles faites aux hommes ?

L’enquête précise par ailleurs que les deux tiers des violences sexuelles déclarées par les hommes s’étaient produites ou avaient débuté avant l’âge de 18 ans. Cependant, contrairement aux hommes hétérosexuels, les hommes homosexuels subissent des violences au-delà de l’adolescence.

 

…poussées au silence par des stéréotypes de genre

S’il est difficile de libérer la parole, c’est avant tout car il existe toujours une violente stigmatisation des victimes masculines. Des préjugés sexistes et homophobes que l’on retrouve en masse sur les réseaux sociaux, la plupart du temps relayés par d’autres hommes. Les stéréotypes associés à la masculinité ont la vie longue et découragent la prise de parole des victimes, qui se retrouvent alors « enfermés dans leur histoire », comme l’explique Violaine de Filippis, avocate et porte-parole d’Osez le Féminisme !. Pourtant, comme l’affirme Aurélien Wiik, « la douleur est plus dure que la honte ».

 

L’acteur Aurélien Wiik ouvre la parole en lançant #MeTooGarçons

 À quelques jours des Césars, l’actrice Judith Godrèche révélait les agressions sexuelles qu’elle avait subies durant son adolescence de la part du réalisateur Jacques Doillon. En 2017, c’était également grâce à l’affaire Weinstein que le monde du cinéma avait permis une libération progressive de la parole des victimes notamment avec l’utilisation massive du hashtag #MeToo.

Mais le 22 février 2024, pour la première fois dans l’industrie du cinéma français, c’est un acteur et non une actrice qui prend la parole sur Instagram pour dénoncer les agressions qu’il a subies de ses 11 à ses 15 ans par son agent et d’autres membres de son entourage. Cet acteur, c’est Aurélien Wiik. Aujourd’hui âgé de 43 ans, il explique qu’il s’est « exprimé sur les réseaux pour encourager les autres à signaler leurs histoires ». Et cela fonctionne.

 

Depuis son post, les témoignages #MeTooGarçons ne cessent de pleuvoir, notamment de la part d’autres personnalités médiatiques, dont Mathieu Kassovitz, qui affirmait au micro de RMC avoir également été agressé sexuellement par des « personnes bien connues qui travaillent toujours dans l’industrie du cinéma ».

 

Petit à petit, ce phénomène de libération de la parole masculine s’étend au-delà du monde du cinéma, prouvant à nouveau que ce dernier possède une influence incontestable sur notre société. Sur X (anciennement Twitter), de nombreux comptes, anonymes ou non, livrent leurs témoignages et démontrent la disparité de ces agressions : certaines ont lieu durant l’enfance, d’autres à l’âge adulte, dans un cadre familial ou non, dans une relation hétérosexuelle ou homosexuelle, certaines relèvent d’une violence physique et d’autres d’une violence psychique…

 

Depuis le lancement du hashtag, de nombreuses personnalités politiques ont réagi pour témoigner leur soutien aux victimes. Les médias ont également permis à ces victimes de venir s’exprimer sur leur plateau pour accélérer le processus de libération de la parole.

 

La Plume

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