Vous avez rêvé des jungles de « Jurassic Park », des déserts de « Star Wars » ou encore des cités de « Game of Thrones »… : le « ciné-tourisme » est fait pour vous. Attention toutefois à l’envers du décors, qui se cache derrière le mythe…
L’envie de rentrer dans le décor
Retrouver les décors d’une œuvre qu’on a aimée n’est pas un nouveau concept (Saint-Tropez doit bien sa célébrité à Brigitte Bardot).Et l’avènement des plateformes de streaming et des séries internationales a décuplé le phénomène. Ce ne sont pas toujours les décors les plus spectaculaires qui sont recherchés : la librairie de Nothing Hill ne serait sans doute pas autant photographiée si elle n’avait accueilli la romance entre Julia Roberts et Hugh Grant.
Ce phénomène prend de l’ampleur et les tour-opérateurs s’organisent. Fini le temps où le ciné-tourisme ne consistait qu’à se rendre dans les studios hollywoodiens ou à visiter des lieux emblématiques. On voyage désormais dans le monde entier en mode thématique, pour découvrir les lieux de tournages des films ou séries-cultes.
Le business s’en prend aux trips
Les productions cinématographiques ont un impact significatif sur le tourisme et l’économie d’un pays.
Harry Potter a attiré à sa suite, 230% de visiteurs supplémentaires dans le comté de Northumberland, générant des revenus de l’ordre de 10 M d’€ entre 2011 et 2013. Magique !
En Irlande du Nord, les fans de Westeros sont également venus en masse : +229% de touristes !
De l’autre côté du globe, La trilogie du Seigneur des anneaux a fait bondir le tourisme annuel de la Nouvelle-Zélande qui est devenue la deuxième activité économique du pays en 2012.
Redorer une image avec la meilleure des pubs
Le ciné-tourisme permet aussi de redorer une image un peu entachée. Après la sortie du film Dunkerque en 2017, la ville portuaire rasée à plus de 80% pendant la 1ère Guerre mondiale et boudée aussi bien des Français que des touristes, a bénéficié d’un net regain d’attention. La fréquentation touristique de la ville a augmenté de 30% après la sortie du film (et le tourisme britannique, de 350% l’été suivant).
Plus récemment, bien des années après l’épicerie Collignon d’Amélie Poulain, Emily in Paris a ramené vers la capitale, les touristes qui l’avaient désertée pour cause de travaux, poubelles et autres pickpockets. A Paris aussi, on considère qu’1€ investi dans le cinéma permet de générer 6,62 € de recettes.
Même la réputation sulfureuse d’antan attachée au quartier du Panier à Marseille, n’a pas résisté à la publicité offerte par Plus belle la Vie.
L’envers du décor
Cette médaille a pourtant son revers.
La sur-fréquentation détruit parfois les lieux de culte. A la suite du film La plage, la baie thaïlandaise Maya Bay a souffert d’un tourisme trop important qui a détérioré durablement son écosystème. En Croatie, la ville de Dubrovnik qui croule sous les hordes de touristes venus voir les décors de King’s Landing, a dû limiter le nombre de visiteurs.
Plus inattendu, le cinéma a également relancé une pratique morbide, le Dark Tourism, qui consiste à se rendre sur des lieux de tournage macabres.
Depuis la diffusion en 2015, de la série Narcos qui raconte la vie criminelle du trafiquant de drogue colombien Pablo Escobar, les visites de son fief de Medellín, où sont concentrés les principaux lieux de tournage, ont augmenté de près de 25%.
Après la diffusion de la série Chernobyl en 2019, 17 000 visiteurs ont été comptabilisés sur le site de la catastrophe nucléaire, soit 8 000 de plus que l’année précédente !
Jetons un voile pudique sur l’indécence des selfies pris à Auschwitz par ces touristes venus à la suite de la série Shoah…
A suivre ?
A la fois manne économique et ogre dévorant ses enfants, le ciné-tourisme n’a sans doute pas fini de prospérer.
Aussi longtemps que seront produits des films et séries s’inspirant de décors réels, les téléspectateurs seront curieux de découvrir les lieux « en vrai ».
En oubliant toutefois que, tout comme les acteurs, ces décors naturels bénéficient parfois de beaucoup de maquillage. Attention donc aux déceptions qui surviennent quand le touriste ne retrouve pas son château pimpant, son mur de glace ou son lac enchanteur. Car c’est aussi ça, la magie du cinéma : sublimer le réel pour le rendre plus beau à l’écran.
By LaPlume, Dauphine