Faut-il encore faire des enfants en 2022 ?
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Faut-il encore faire des enfants en 2022 ?

Le nombre d’humains sur Terre a dépassé la barre des 8 milliards. « C’est l’occasion de célébrer notre diversité, de reconnaître notre humanité commune et de nous émerveiller des progrès en matière de santé », selon Antonio Guteres, secrétaire général des Nations Unies. Mais le risque de dépassement des limites planétaires fait aussi naître de nombreuses questions. 

C’est le 15 novembre 2022 que la Terre a vu naître son habitant n°8 000 000 000. La population mondiale a doublé en 50 ans, elle devrait atteindre un pic à 10,4 milliards en 2100. La transition démographique serait alors achevée pour la majorité des pays. L’explosion démographique a une fin. Aujourd’hui, la croissance de la population est à son plus bas depuis 1950. La fécondité n’a cessé de baisser durant les dernières décennies pour de nombreux pays. 2/3 de la population mondiale vit dans un pays où la fécondité est inférieure 2,1 par femme. Cependant, à l’heure où les risques écologiques et alimentaires se font plus pressants, est-il raisonnable de participer à l’augmentation de la population ?

Faire moins d’enfants pour être plus écolo ?

De l’avis de nombre d’experts, l’objectif des 1,5°C semble désormais derrière nous. Même si les engagements pris à la COP 27 étaient tenus, le monde connaîtrait un réchauffement de 2,5°C d’ici la fin du siècle. La croissance démographique en est une des causes majeures. Selon le GIEC, « les croissances économique et démographique continuent d’être les moteurs les plus importants » de l’augmentation des émissions de gaz à effets de serre. Mais toutes les naissances n’ont pas les mêmes conséquences : l’empreinte carbone totale de la naissance d’un enfant aux Etats-Unis est plus de 160 fois supérieure à celle d’un enfant au Bangladesh. Même si, par exemple, l’Afrique subsaharienne sera responsable de la moitié de la hausse démographique jusqu’en 2050, les naissances dans ces pays ne sont pas celles qui contribueront le plus au changement climatique. Les désastres écologiques ne sont pas directement dus au nombre d’habitants sur Terre, mais bien à leur mode de vie : au 20ème siècle, les émissions de CO2 ont été multipliées par 15, alors que la population mondiale n’a augmenté que d’un facteur 4. La vraie question est : sommes-nous capables de transformer radicalement nos manières de vivre ?

Peut-on nourrir tout le monde ?

Le réchauffement climatique et la dégradation de l’environnement ne sont pas les seules peurs suscitées par l’explosion de la démographie. La guerre en Ukraine a remis les risques de famine au premier plan. Déjà en 2021, 10% de la population mondiale souffrait de la faim. L’augmentation de la population risque de provoquer une insécurité alimentaire généralisée, en tous cas dans les pays pauvres. Mais peut-être sous-estimons-nous la capacité de la Terre à nourrir ses habitants. Plus de 2/3 des terres agricoles sont consacrées à l’élevage. 1,3 milliards de tonnes de nourriture sont jetées par jour dans le monde. 10 millions d’hectares de terres arables disparaissent chaque année à cause de pratiques agricoles destructrices et de l’artificialisation des sols. Au contraire, les pratiques agroécologiques permettent d’améliorer la fertilité des sols tout en récoltant abondamment les fruits de la terre. Là encore, la source du problème ne se situe peut-être pas dans le nombre de personnes à nourrir. Il est cependant certain que si nous ne changeons pas radicalement nos manières de nous nourrir, la situation deviendra critique. D’autant que les problèmes agricoles sont mêlés à une distribution très inégalitaire des richesses et à une pauvreté structurelle dans de nombreux pays.

Certains font le choix de ne pas avoir d’enfants par responsabilité écologique, d’autres à cause d’un pessimisme lucide sur ce que vivront demain les bébés d’aujourd’hui. Mais n’oublions pas les réelles sources écologiques et sociales des dérèglements que nous vivons. Accuser les jeunes parents d’irresponsabilité peut conduire à occulter les vrais responsables des désastres planétaires qui se profilent. Et surtout, gardons espoir, un autre avenir est possible, où donner la vie ne sera plus un cas de conscience.

Par Amélie Rugraff, L3 LISS

 

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