Le 2 mars 2022, le président Emmanuel Macron a déclaré le soutien unanime de la France au peuple ukrainien et à son dirigeant, Volodymyr Zelensky. Au début du discours, il a affirmé que les pays membres de l’Alliance Atlantique (l’OTAN, coucou Dauphine) ont « tout fait pour éviter cette guerre ». Comment ? Par le dialogue. Emmanuel Macron a rappelé les négociations entamées avec la Russie depuis 5 ans et les engagements devant garantir la modération des décisions de Vladimir Poutine. Pour autant, cela n’a pas empêché le président russe d’envoyer les chars d’assaut et de partir bombarder le Donbass. Lecteur averti, posons nous ensemble la question suivante : le dialogue suffit-il pour convaincre les nations de baisser les armes ?
Le dialogue : point d’orgue de la diplomatie depuis 1945
Les deux guerres mondiales ont amené les Etats à développer de forts niveaux d’interdépendances pour que de tels conflits ne se reproduisent jamais. Les événements actuels nous prouvent l’échec de ces tentatives. Néanmoins, l’évolution des politiques étrangères des nations a façonné le monde dans lequel nous vivons. Le choix d’ouverture des Etats au libre-échange a permis la conclusion des accords de Bretton Woods, donnant naissance au FMI, à l’OMC et à la Banque Mondiale. Le rapprochement des pays a également permis la fondation de l’Union Européenne, garante d’une certaine stabilité au sein de notre continent. Ces liens ont été créés et fortifiés par des négociations orales, ce qui montre le pouvoir du dialogue dans la construction de relations pérennes entre nations. Ces pays sont également insérés dans des accords commerciaux mondiaux, comme l’UE ou l’ALENA. Ces engagements auxquels ils sont tenus les incitent donc à conserver une part de dialogue avec leurs partenaires commerciaux.
Une conception du dialogue universelle ?
Si l’Occident a pu privilégier le dialogue dans tout échange, c’est parce que les États le composant partagent des idéologies proches. Les civilisations de ces pays conçoivent une même définition du dialogue, façonnée par leur culture, les évolutions successives des régimes politiques en vigueur et la place des individus en société. Leur économie à l’échelle mondiale et leurs relations commerciales ont également un rôle à jouer. Notre bon vieux Karl Marx expliquait : “La production des idées, des représentations et de la conscience, est d’abord directement et intimement mêlée à l’activité matérielle et au commerce matériel des hommes : elle est le langage de la vie réelle”.
Quid des Etats où la liberté des citoyens n’est pas garantie ? Où la corruption est importante ? Où l’armée est au pouvoir ? Qu’en est-il des Etats en guerre ? Il paraît difficile de penser que ces pays imposent leurs idées par les mêmes canaux que ceux présentés dans le paragraphe précédent. Il faut donc tenir compte lors des négociations de ces spécificités qui vont influer sur la manière d’appréhender le dialogue avec ces pays.
Qu’en conclure ?
Le dialogue s’avère être une méthode efficace pour assurer le maintien de la paix. Il bénéficie aux États de chaque côté de la négociation. Cependant, ce n’est pas un concept universel. Il dépend de caractéristiques civilisationnelles. Pour assurer le succès des négociations, il faut donc s’adapter au pays avec lequel on entre en pourparlers, si celui-ci ne partage pas exactement la même conception du dialogue que nous. L’échec des échanges avec le gouvernement russe peut peut-être s’expliquer par le fait que l’Occident a pensé pouvoir exporter sa vision sans prendre en compte le pays qu’il avait en face. Aussi, s’adapter à l’autre ne convient pas à chaque situation : c’est ici que le dialogue vient en support d’actes militaires concrets, afin de pouvoir faire passer ses idées. Il faut également, pour que tout dialogue aboutisse, une volonté de négocier des deux parties. Et c’est peut-être ce qui a entraîné l’échec des négociations avec la Russie, Vladimir Poutine suivant ses convictions personnelles sans aucune réelle intention d’échange. Lui-même déclara : “Vous pouvez faire beaucoup plus avec des armes et de la politesse que juste de la politesse”.
By La Plume, Dauphine