L’espace et les mathématiques

L’espace et les mathématiques

On peut avoir tendance à l’oublier, mais la majorité de notre histoire scientifique s’est bâtie sur l’absence de machines calculatrices. Imaginez-vous seulement multiplier des nombres de l’ordre de grandeur des milliards entre eux. Encore et encore.

« La pensée mathématique est belle parce qu’elle est possible n’importe où. », selon Daniel Tammet. C’est précisément parce que cette science est applicable à une infinité de domaines qu’elle a pu autant se développer. Une grande partie des outils mathématiques sont nés face à des contraintes rencontrées par les chercheurs.  L’une d’elles ? La nécessité de simplifier les calculs, notamment pour l’étude du ciel.  

Jusqu’au XXe siècle, simplifier les calculs était un enjeu majeur des sciences puisque les scientifiques eux-mêmes devaient effectuer les calculs. La transformation des quotients en sommes était au cœur des débats. Rappelez-vous  vos cours d’école primaire. Sur papier, il est bien plus simple de poser une addition qu’une multiplication. Additionner demande moins d’étapes supplémentaires.  

Un besoin d’autant plus important au XVIe siècle, avec le développement de l’astronomie. Pour la pratiquer, il faut déterminer la trajectoire ou la position des planètes et autres corps célestes. Ce qui implique une série de calculs techniques et un maniement de nombres complexes avec une valeur très importante. Les planètes sont à des millions, voire des milliards de kilomètres. Il était donc crucial de pouvoir simplifier les relations entre ces nombres pour faire avancer la discipline et ne pas se perdre dans des valeurs numériques assommantes. Imaginez-vous seulement multiplier des nombres de l’ordre de grandeur des milliards entre eux. Encore et encore. 

Des techniques qui permettaient de transformer un produit en un quotient existaient déjà. Mais il fallait passer par la trigonométrie. Je vous ferai grâce de l’explication mathématique des tables trigonométriques du XIe siècle. Mais cette méthode était extrêmement longue. Elle demandait de travailler sur des angles et sur des radicaux. Donc d’effectuer à nouveau des calculs sur les nombres que les scientifiques voulaient simplifier. Légèrement paradoxal. 

 

C’est alors que certains savants eurent l’idée de passer par de l’algèbre plutôt que par la trigonométrie. Et donc, de passer par les suites géométriques. Mais qu’est-ce qu’une suite géométrique ? Un enchaînement de nombre défini par récurrence, c’est-à-dire par rapport au terme précédent. Autrement dit, on calcule le terme n+1 à partir du terme n. Une suite géométrique a pour spécificité de multiplier le terme n par un autre nombre pour obtenir le terme n+1. Cela pourrait être par exemple, pour la suite « a » :
« a » : n+1 = n *2 avec n= 1 ;
dans ce cas on aura n= 1 puis n= n*2 = 2 ; n= 4 ; n= 8 ; n= 16 etc…


En reprenant la suite géométrique « a », on peut voir qu’il existe une relation entre les indices de la suite et les valeurs de la suite. Par exemple, si on souhaite calculer n7, il nous faudrait calculer ndonc implicitement net ainsi de suite. C’est là qu’intervient l’innovation. On sait que 7 est égal, entre autres, à 3+4. Or, si on prend les valeurs des termes de la suite avec les indices correspondants (net n) et qu’on multiplie ces termes, on obtient : 8 * 16 = 128, ce qui est la valeur de de n(vous pouvez vérifier). 

On en revient à l’objectif initial : trouver une relation entre les additions et les multiplications. Certains savants, dont John Napier,  vont exploiter cette concordance entre les indices et les termes d’une suite. Napier créé ainsi en 1614 un outil mathématique très connu aujourd’hui, le logarithme. La propriété fondamentale du logarithme est justement :
Log(a * b) = log(a) + log(b)

Cette propriété répond directement aux besoins des scientifiques du XVIIe siècle. Ils ont pu utiliser les logarithmes pour décrire la trajectoire de Mars ou bien découvrir les satellites de Saturne, comme Titan, découvert en 1655. Pour utiliser cet outil, il fallait donc se munir de tables logarithmiques qui répertoriaient un ensemble de nombres en logarithmes sur plusieurs pages. Ces tables fastidieuses ont été utilisées jusqu’à l’avènement des calculatrices portables. Et donc, jusqu’à la génération de nos grands-parents ! 

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