Suite à la demande du président malien par intérim, Dioncounda Traoré, notre armée a précipité l’intervention prévue initialement pour septembre 2013 par une résolution de l’ONU, temps nécessaire pour réunir et former un contingent de la Cédéao. Les différentes factions djihadistes occupant la moitié orientale du pays (l’Azawad) n’ont hélas pas respecté ce calendrier en faisant route vers Bamako, la capitale. Sans l’intervention française, l’établissement d’un « Etat djihadiste » n’aurait été qu’une question de semaines face à une armée malienne aculée de toute part, trop préoccupée par la politique politicienne depuis le coup d’Etat du capitaine Sanogo. En France, c’est « l’union nationale » autour de cette décision, malgré quelques interrogations qu’il est légitime de se poser dans une démocratie. On ne peut pas en dire autant de nos partenaires européens qui, au mieux, nous accordent un timide soutien logistique - pensez, c’est bien grâce aux deux avions de transport belges que nous allons la gagner cette foutue guerre ! -. Et c’est là que le bât blesse !
Pour éviter les suspicions de néocolonialisme, arlésiennes de chacun des faits et gestes français sur le continent africain, il aurait fallu qu’une armée commune européenne prenne en charge cette intervention. Ah mais j’oubliais, elle n’existe toujours pas ! Au lieu de ça, le Mali, ancienne colonie française, devrait être notre fardeau exclusif. C’est oublier un peu vite le foyer terroriste implanté dans cette région, à quelques encablures de l’Europe. La récente prise d’otage d’une raffinerie de BP en Algérie devrait le leur rappeler, si tant est qu’on puisse oublier les récents attentats sur notre continent, Londres et Madrid en tête. Quant aux saintes-nitouches tendance Giscard, qui semblent avoir oublié les diamants reçus de Bokassa, et aux pourfendeurs réguliers de l’impérialisme, je tiens à leur rappeler la double légitimité de notre présence au Mali sur le plan du droit international : résolution de l’ONU et appel du président malien. De plus, François Hollande, en cas de succès, y gagnerait surtout une extrême popularité auprès de la population malienne – ça lui ferait une belle jambe ! L’exploitation d’hydrocarbures, à l’inverse de la Lybie, n’y est qu’au stade de l’exploration. Serait-ce l’une des raisons de la défection des puissances occidentales à nos côtés ? Je n’ose l’imaginer …
Les Britanniques sont trop occupés à savoir s’ils restent européens, si tant est qu’ils ne l’aient jamais été. Nein ! est définitivement une locution à la mode Outre-Rhin, l’Allemagne ayant déjà beaucoup à faire dans son rôle de père fouettard des finances publiques européennes. L’Italie quant à elle nous rejoue une énième Commedia dell’arte politique. Finalement, Catherine Ashton qui brille aussi bien par son absence que par sa timidité, concorde, pour une fois, avec sa fonction de Haut Représentant de l’Union aux affaires étrangères et à la politique de sécurité. Elle représente effectivement à merveille le constat d’absence de politique étrangère commune et la défection de nos partenaires du théâtre des opérations maliennes. La mollesse européenne tranche avec la présence de troupes provenant de pays de la Cédéao. C’est au moins cela !
Une mention spéciale serait également à décerner aux Etats-Unis. En effet, comme l’a révélé le New York Times, les autorités américaines ont financé à hauteur de quelques centaines de millions de dollars la formation de certains pans de l’armée malienne. Malheureusement, il se trouve que, parmi les soldats formés on retrouve le capitaine Sanogo, largement responsable de l’affaiblissement de l’Etat malien avec son coup d’Etat, mais aussi des soldats d’origine touareg qui se sont empressés de rejoindre les rangs de l’alliance entre Touaregs et islamistes. Encore une mauvaise pioche pour les services de sécurité américains, qui se limitent aujourd’hui à un soutien logistique de l’intervention française.