C’était il y a presque quarante ans. Le 4 août 1982, l’ancien Premier ministre de François Mitterrand, Robert Badinter, et la célèbre avocate Gisèle Halimi faisaient voter la loi Forni pour mettre fin au dernier délit d’homosexualité en France. Mais cette révolution dans l’histoire des droits humains n’a pas signé la fin des combats des militants LGBT. À l’occasion de cet anniversaire spécial, La Plume revient sur quatre décennies de conquêtes pour le libre choix de son orientation sexuelle et de son genre.
2022 et toujours en lutte
Dernière victoire en date : l’interdiction des thérapies de conversion, passibles de 2 ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende depuis le 25 janvier 2022. Ces actes de torture physique et psychologique (entretiens, exorcismes, et même électrochocs) entendent guérir les individus homosexuels ou transgenres, jugés « malades » par leurs bourreaux. Les témoignages de jeunes traumatisés par leurs expériences vécues en « sessions de guérisons » s’étaient multipliés ces dernières années.
Si le quinquennat d’Emmanuel Macron a été rythmé par quelques mesures prometteuses, le bilan est loin d’être à la hauteur des revendications de la communauté LGBT. Certes, la loi bioéthique a été votée en juin 2021. Mais elle exclut de droit les hommes transgenres de la PMA pour toutes (réservée aux lesbiennes et femmes seules) et de l’autoconservation des gamètes (possibilité de congélation des ovocytes ou spermatozoïdes afin de les avoir à disposition pour un projet d’enfant a posteriori). Globalement, les associations déplorent beaucoup d’ébauches et de gestes symboliques, pour peu de mesures concrètes. Don de sang des homosexuels dans les mêmes conditions que les hétérosexuels, circulaire du ministère de l’Éducation nationale pour « une meilleure prise en compte des questions relatives à l’identité de genre » à l’école… Des mesures qui n’ont pas permis à la France de remonter au classement ILGA 2021 des pays européens LGBT-friendly. Au contraire, elle a perdu neuf places. En cause, le vide juridique pour les personnes intersexes.
Des droits acquis à force de persévérance
Mai 1981, François Mitterrand remporte le second tour de la présidentielle. La communauté gay retient son souffle. Le chef d’État nouvellement élu avait fait la promesse pendant sa campagne qu’avec lui, « l’homosexualité ne [serait ] plus un délit » malgré la relative impopularité de la question à l’époque. En réalité, le crime de sodomie (NDLR : à l’époque, le terme désigne tous les actes sexuels condamnés par l’Église, c’est-à-dire non liés à la procréation) est aboli depuis la Révolution française. Le gouvernement de Robert Badinter abroge, lui, la dernière loi discriminatoire héritée du régime de Vichy. Elle fixait l’âge de la majorité sexuelle à 18 ans pour les homosexuels (contre 15 pour les hétérosexuels).
La cause devient de plus en plus médiatisée dans les années 80. Notamment grâce à l’activisme des associations LGBT pour la lutte contre le VIH – la première association Vaincre le sida est créée par des militants homosexuels dès 1983. Le 17 mai 1990, l’OMS supprime enfin l’homosexualité de la liste des maladies, mais le « transexualisme » y demeure jusqu’en 2010. En France, le PACS est voté en 1999. Pour la première fois, des individus de même genre peuvent s’unir légalement. Suivra, en 2013, la célèbre loi sur le mariage et l’adoption pour toutes et tous portée par Christiane Taubira. En parallèle de l’évolution des droits LGBT se développe timidement une législation pour lutter contre l’homophobie et la transphobie, reconnues comme des discriminations respectivement depuis 2004 et 2013.
L’égalité des droits ne signifie pas la fin des discriminations
Malgré les droits obtenus au cours des quarante dernières années, les personnes LGBT continuent d’être victimes en France de discriminations non négligeables. En 2019, 55 % des individus de la communauté déclarent avoir subi des actes homophobes ou transphobes au moins une fois au cours de leur vie. Parce qu’elle subit harcèlement et jugement, particulièrement dans le milieu scolaire, la communauté LGBT est quatre fois plus vulnérable au risque de suicide que la moyenne française.
By La Plume, Dauphine