L’astrologie, nouveau critère d’embauche ?

L’astrologie, nouveau critère d’embauche ?

Et si votre horoscope avait finalement raison concernant votre avenir professionnel ? C’est en tout cas ce que pensent un certain nombre de responsables de recrutement partout dans le monde. Décryptage.

Tout le monde a déjà consulté son horoscope pour découvrir l’évolution de sa carrière. Mais peu l’ont pris au sérieux, à l’exception, peut-être, des adeptes et pratiquants de l’astrologie. D’ailleurs, les experts n’hésitent pas à réaliser les classements des cinq signes les mieux payés ou les moins touchés par le chômage. Tant que cela en reste à des études peu prises au sérieux, tout va bien. Le problème est qu’un nombre croissant d’employeurs semblent se fier aux horoscopes et autres thèmes astraux dans leurs choix de recrutement.

« Vous pouvez postuler, sauf si vous êtes Scorpion ou Taureau »

Les annonces de ce type existent bel et bien. En Autriche en 2009 puis en Chine en 2011, deux offres d’emploi ont fait scandale car elles spécifiaient les signes astrologiques recherchés par l’employeur. Il semblerait même que ce type de recrutement ne soit pas rare. En France, de nombreuses « voyantes » affirment être souvent consultées par des recruteurs. Selon une étude du laboratoire de psychologie de l’université Bordeaux-II en 1993, le recrutement d’un cadre sur 10 passerait par l’arbitrage d’astrologues, de graphologues ou de numérologues.

En 2000, L’Express mentionnait déjà ce phénomène dans un article sur l’influence des astrologues en France : « Qui vous a vraiment embauché ? Un chasseur de têtes ou un astrologue ? ». Plus récemment, le site de recrutement Qapa.fr, dans un article publié en 2015, semblait corroborer cette croyance en l’influence du signe astrologique sur la vie professionnelle. L’interprétation du thème astral des candidats, moins coûteuse que les tests psychologiques (pourtant beaucoup plus fiables), fait partie des nouvelles méthodes de recrutement listées par Jean-François Amadieu dans son Livre noir des DRH, au même titre que l’analyse graphologique (l’analyse du style d’écriture pour en déduire les traits psychologiques).

Une volonté de limiter l’incertitude

Le recours à l’astrologie lors du recrutement est motivé par la recherche du risque zéro : lorsque l’on embauche quelqu’un, on peut toujours se tromper et choisir un candidat peu productif. Dans cette perspective, tous les critères sont bons pour certains recruteurs en vue de faire le choix parfait, même les méthodes peu fiables comme l’astrologie ou la numérologie. Vous pourrez donc vous voir refuser un emploi du fait de votre signe astrologique, qui vous prédisposerait à être distrait ou à ne pas vous investir à long-terme dans votre travail.

Mais cette tendance peut être vue comme un cercle vicieux. Si un signe astrologique particulier est caractérisé par certaines qualités professionnelles, le signe de ceux qui réussissent dans leur carrière par exemple, les employeurs croyant à l’astrologie ne recruteront que les personnes nées sous ce signe, ce qui ne viendrait que confirmer les prévisions astrales.. Même si des voyants sont consultés lors d’un recrutement, l’embauche n’est heureusement pas seulement liée à des critères ésotériques. Ils ne restent que des méthodes secondaires de recrutement, et les candidats sont évalués sur bien d’autres critères. Cette pratique reste donc, heureusement, limitée.

Ce critère de recrutement est-il une forme de discrimination à l’embauche ?

Les systèmes juridiques ne sont pas tous adaptés au recours à ces pseudosciences. En 2009, l’employeur autrichien ayant précisé quels signes il ne souhaitait pas recruter a été attaqué en justice. Mais selon la loi autrichienne de l’époque, le recours à l’astrologie n’était pas explicitement interdit, et l’offre d’emploi n’était donc pas illégale. En France au contraire, la loi déconseille l’utilisation de l’astrologie depuis 1993 : « Au regard du critère de pertinence, il est tout aussi inopportun de recourir à des méthodes aux résultats aléatoires, telles que l’astrologie, la numérologie, voire la graphologie, dont la validité prédictive du point de vue de l’aptitude à l’emploi n’est nullement établie ». De plus, si le recruteur effectue des tests et analyses relevant de l’astrologie, il doit en informer le candidat.

En France, le recours à l’analyse astrologique relève donc d’une forme de discrimination à l’embauche. En effet, cette analyse implique que l’on peut classer et juger les personnes non sur leurs talents ou capacités individuelles mais sur des critères ne dépendant pas d’eux, ici la date de naissance. Une solution possible serait, comme pour plusieurs formes de discrimination à l’embauche, la généralisation du CV anonyme.

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