Un désastre oublié

Un désastre oublié

Depuis mars 2015, la guerre civile fait rage au Yémen. Malgré une situation catastrophique avec 3 millions de déplacés, le conflit continue dans l’indifférence générale

Les racines de la guerre 

Nous sommes en 2011. Le printemps arabe bouleverse l’ensemble du Moyen-Orient. Le Yémen fait partie de ces pays balayés par le vent de la révolution. En 2012, l’ancien président yéménite Saleh est contraint d’abandonner le pouvoir et est aussitôt remplacé par le maréchal Hadi. Cependant, si la communauté internationale reconnaît la légitimité de ce nouveau président, ce n’est pas le cas d’une partie de son propre pays. Ainsi, plus de 10 000 rebelles houthis contestent son autorité. Ces derniers étaient à l’origine de simples membres d’une école de pensée zaydiste (courant chiiste). Ils se sont finalement scindés en deux factions : l’une pacifiste, et l’autre prônant la lutte armée.
Ils estiment avoir été lésés lors de la réunification en 1990, d’où leur engagement dans la rébellion. C’est alors que le président sortant Saleh décide de soutenir ces alliés inattendus. Le pays rentre en guerre civile : l’horreur commence.

En 2014, le combat débute pour ne faire qu’empirer. Dès 2015, les pays voisins voient dans le conflit yéménite une superbe opportunité de s’affirmer sur la scène internationale.  La coalition menée par l’Arabie Saoudite commence à bombarder le pays pour anéantir les rebelles houthis. Hôpitaux, écoles, rien n’est épargné. L’Iran, de son côté, combat aux côtés des houthis. D’un côté, une coalition dirigée par un pays sunnite (L’Arabie Saoudite). De l’autre, des soldats aidé par l’Iran, figure majeure du chiisme. La rivalité historique entre les deux courants accentue encore les tensions. Et ça, les mouvements djihadistes l’ont bien compris. Ils profitent largement de la confusion pour accroître leur influence dans le pays. Ainsi, Al-Qaïda reste bien ancrée à l’ouest, tandis que l’Etat Islamique (EI) se développe à l’ouest et du côté d’Aden.

Pour un pays qui n’est pas autosuffisant, les conséquences sont terribles. Selon de récentes estimations, 80% de la population aurait aujourd’hui besoin d’aide humanitaire. Mais comment faire ? Même un hôpital de Médecins Sans Frontières (MSF) a été pris pour cible ! Les civils sont les premiers touchés : en plus des bombes, le blocus saoudien fait des ravages. En effet, le Yémen dépend massivement des importations pour subvenir à ses besoins. Sans commerce, la faim s’installe. Un rapport alarmant de l’UNICEF affirme que 1,5 million d’enfants yéménites souffriraient de malnutrition !

Aujourd’hui, la guerre a fait plus de 9000 morts, un nombre sans doute sous-évalué. Mais pire que la mort, pire que la famine présente dans le pays, il existe quelque chose de plus choquant encore : l’oubli.

La loi du silence

L’Occident s’est indigné (à juste titre !) des massacres perpétrés en Syrie. Du sort des réfugiés d’Alep. Mais qui parle du Yémen ? Qui dénonce le mépris omniprésent des droits de l’Homme ? Presque personne. Alors, pourquoi cette indifférence générale ? La réponse est simple. Terriblement simple. Parce que nous, Occidentaux, avons finalement notre part de responsabilité dans cette histoire. Les Etats-Unis, mais aussi le Royaume-Uni et la France ont aidé plus ou moins indirectement l’Arabie Saoudite dans ses assauts. Vente d’armes, support logistique, les grandes puissances omettent volontairement d’aborder les atrocités du conflit alimentées par leur propre armement.

Certes, de petits efforts ont été effectués. Les Etats-Unis ont refusé de délivrer des armes supplémentaires. Un vote du Parlement européen a même mis en place un embargo sur le matériel militaire vers l’Arabie Saoudite. Mais tout cela reste bien insuffisant. Il nous faut envoyer davantage d’aide humanitaire, et surtout, parler. Parce que c’est la seule façon de faire entendre à nos gouvernements ce qu’ils ne veulent pas voir. Parce que se voiler la face ne diminuera jamais le poids de la responsabilité.

Alors, ne faites pas comme nos dirigeants.

N’oubliez pas le Yémen.

 

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