La Vie Secrète des Plantes à la Maison Européenne de la Photographie
Crédit : Irène Gauthier

La Vie Secrète des Plantes à la Maison Européenne de la Photographie

Dans beaucoup de grandes stations de métro du centre parisien, on ne peut s’empêcher de remarquer les plantes fluorescentes, impressions démesurées de noir-et-blancs minimalistes, et les superpositions légendaires de l’artiste Stephen Gill, en ce moment exposé à la Maison Européenne de la Photographie (MEP) à Paris. En vingt ans à Paris, on n’aura jamais vu la MEP mettre autant d’efforts dans le marketing.

D’ailleurs, ça marche, car elle n’a jamais été aussi peuplée : peut-être que c’est grâce aux immenses impressions dans les couloirs de Gare du Nord. Ou peut-être que c’est parce que j’y suis allée le weekend de l’ouverture… Dans les deux cas, on comprend le monde : une fois rentré, on est absorbé par les différents styles de photographies et par l’inventivité des auteurs.

Crédit : Irène Gauthier

La photographie est un art souvent mal visualisé par ceux qui ne le connaissent pas : il n’y est pas question de précision de l’image comme ça peut être le cas dans certaines peintures, puisqu’une photo est en principe assez nette. Mais qu’on soit un photographe amateur ou un newbie complet, on sait reconnaître le caractère étonnant des clichés exposés. Une feuille appliquée directement sur du papier photosensible, par exemple, technique novatrice pour l’époque autant que pour aujourd’hui. Ou des superpositions comme celles de Stephen Gill (oui, oui, elles m’ont marquée). Ou encore, des arbres aux racines imposantes photographiées avec un objectif grand angle par Kalev Erickson pour les faire ressembler à une espèce extraterrestre venue envahir la terre. Les photos sont précises par nature, mais ce qui les rend intéressantes, c’est qu’elles racontent une histoire, une « impression », une intention de l’artiste, qu’il sait combiner avec la technique. Pour moi, c’est là que réside l’art.

Oeuvre de Stephen Gill, Irène Gauthier

D’autant plus qu’il ne faut pas oublier que beaucoup de ces photographies ont été prises à l’argentique. Si l’argentique revient en vogue aujourd’hui pour son look « vintage », il a en fait été l’unique médium de la photographie pendant plus de 150 ans et le jeu qu’il permet avec la lumière a donné lieu à moultes expérimentations, avant le passage au numérique il y a une vingtaine d’années. Ce qui est intéressant, c’est qu’il offre peu de possibilités de « manipulation » de l’image après-coup, comme on peut le faire aujourd’hui avec Photoshop et les photos numériques. C’est pour moi ce qui rend beaucoup des œuvres présentées impressionnantes : les artistes arrivent à faire passer leur intention en un seul cliché, sans autre modification possible au développement que celle de l’agrandisseur.

L’exposition se termine sur de l’art plus « activiste » (mot utilisé avec précaution, l’expo n’est pas particulièrement politiquement engagée) : un film mêlant l’évolution humaine avec celle des plantes, de Darwin au « je pense donc je suis ». Des photographies du déclin également : celui de la pellicule tout comme celui des bâtiments.

Gros point négatif pour la consumériste de souvenirs que je suis : la boutique, franchement décevante dans le choix de cartes postales. Cependant, j’accepte mon sort, car les impressions photo sont réglementées dans le domaine de l’art pour ne pas dépasser 30 exemplaires en circulation. Je laisse donc à l’art ce qui est à l’art, et je pars les mains vides, mais la tête pleine de beaux souvenirs.

Bref, l’expo est un succès, elle est originale, happante esthétiquement et fondamentalement, un régal pour les initiés et pour les curieux. Petit bonus : la MEP se situe entre Saint-Paul (le Marais) et Pont-Marie (la Seine), si vous voulez vous balader !

Oeuvre de Kalev Erickson, Irène Gauthier

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