La fanfiction : une nouvelle forme de littérature ?
Différentes adaptations de Orgueil et Préjugés de Jane Austen - © Eymery

La fanfiction : une nouvelle forme de littérature ?

Depuis le début des années 2000, les fanfictions ont eu une importance grandissante. Très lues et appréciées, elles sont aujourd’hui parfois publiées. Mais malgré leur grand nombre de lecteurs, les fanfictions sont-elles une forme de littérature à part entière ?

Parfois, lire une fanfiction Wattpad peut être intéressant. Promis. En quelques mots, ce récit est une œuvre de fiction écrite et basée sur une œuvre, un univers ou des personnages déjà existants. On distingue deux principaux genres de fanfictions. Certaines sont basées sur des œuvres, dont on ne reprend pas toujours tous les aspects. Parfois, on ne garde que les personnages que l’on déplace dans un univers différent. Dans d’autres, on étend l’histoire en y ajoutant des détails. On la modifie partiellement, ou la fait partir dans une direction opposée.

Un autre type de fanfictions s’est développé dans les années 2010, avec la montée des boysbands : celles sur des personnages réels. L’exemple le plus parlant ? Les One Direction, aka la plus grande inspiration à cette époque. Sur AO3, un des sites de fanfictions les plus utilisés, on recense plus de 65000 publications sur le groupe. Aujourd’hui, c’est le groupe BTS qui domine : on compte 1,5 millions de publications, toujours sur AO3.

Si la fanfiction a connu sa plus grande expansion grâce à Internet, il en existait des formes bien avant. À bien des égards, on peut considérer L’Enéide de Virgile comme une fanfiction de l’Odyssée, qui reprend ses mythes et son univers en changeant les personnages. Vendredi Ou La Vie Sauvage de Michel Tournier est basé sur Robinson Crusoé de Daniel Defoe. Ici, on rajoute de la matière à une histoire préexistante en développant certains points. C’est bien une fanfiction. En poussant la réflexion encore plus loin, on pourrait aller jusqu’à dire que La princesse de Clèves est, elle aussi, une fanfiction.100 ans avant la publication du roman, il existait une Marie de Clèves… ayant une histoire assez similaire à celle de l’héroïne de Mme de Lafayette ! Alors si les fanfictions existent depuis si longtemps, comment se fait-il qu’elles soient aujourd’hui tant stigmatisées ?

Les fanfictions ne sont pas des œuvres originales. Par définition, elles sont inspirées par un autre matériel. Ces histoires peuvent être vues comme moins travaillées, et de moins bonne qualité que si elles avaient été inédites. Elles peuvent être écrites par n’importe qui. Aucun éditeur ne vérifie ce qui est publié, il n’y a pas de contrôle. Souvent, pas de relecture. De cette liberté naît un panel de fanfictions dont la qualité varie. On trouve aussi bien des écrits qu’on pourrait retrouver en librairie, que des histoires à la qualité pour le moins… discutable. Fautes d’orthographe, scénarios insuffisants, personnages creux et clichés sont leurs principaux défauts.

Néanmoins, les chiffres sont sans équivoque. Les fanfictions sont extrêmement lues. Sur AO3, All the Young Dudes, l’histoire la plus lue, cumule à ce jour plus de 4,2 millions de vues. À titre de comparaison, le livre le plus vendu en France en 2020 (L’Énigme de la chambre 622 de J. Dicker) s’est écoulé à environ 50 0000 exemplaires, soit 8 fois moins. De la même façon, la popularité de certaines fanfictions leur a permis d’être éditées. Les séries Fifty Shades et After étaient initialement des fanfictions, respectivement inspirées par Twilight et Harry Styles. Si leur qualité peut être remise en question, on ne peut nier leur importance. Toutes deux se sont vendues à plusieurs millions d’exemplaires et ont été adaptées au cinéma, connaissant un immense succès (plus de 500 millions de dollars au box-office pour Fifty Shades of Grey).

Mais ces œuvres ont, avec le temps, perdu leur qualité de fanfiction. Ne serait-ce que pour être publiées, il a fallu changer les noms et détails permettant de reconnaître un univers protégé par des droits d’auteur. De même, et, malgré leur succès, beaucoup ne les voient pas comme une forme de littérature “valable” aux yeux des gens - encore une fois, peut-être à raison.

Les fanfictions souffrent d’une réputation de lecture facile, peu intellectuelle, qui ne compte “pas vraiment”. Mais avec le temps, peut-être évolueront-elles pour devenir un genre littéraire reconnu. Qui sait, dans 100 ans, on pourrait les étudier à l’école !

By La Plume, Dauphine

 

Laisser un commentaire

Fermer le menu