Hé Oh la paix !

Hé Oh la paix !

Jeudi 28 Avril dernier, Benyamin Nétanyahou, premier ministre israélien a refusé la main tendue par la France d’organiser une conférence de relance des négociations autour du séculaire conflit israélo-palestinien.

Bien entendu, l’objectif de cette invitation de l’exécutif français semble être de consolider la place de la France sur le plan diplomatique. Cependant, à l’instar des tentatives de négociations engagées en avril 2014 par John Kerry, secrétaire d’Etat américain, il est probable que le processus de rapprochement n’aboutisse pas, si les deux parties venaient à se rencontrer.

Le statut quo, auquel les décideurs politiques occidentaux, palestiniens et israéliens sont confrontés, n’est-il pas le fruit d’un processus historique complexe tant souvent omis ?

 

Indéniablement, 
la montée des idéologies extrémistes au sein des deux camps, débouchant sur l’entrave de la reprise du processus de paix, a contribué à l’oubli des réalités historiques. Le recours systématique à la lutte armée s’est renforcé du fait de l’absence d’avancées concrètes dans les négociations et de la cécité des autorités coloniales, puis israéliennes, face à la problématique autochtone.

Si la branche armée du Fatah, al-Assifa, s’engage dès 1965 dans des actions de sabotage contre ce que Yasser Arafat nommait alors l’entité sioniste, violences et tensions régionales sont antérieures. Avant même que David Ben Gourion proclame l’indépendance de l’Etat d’Israël en avril 1948, des points de friction se manifestaient déjà. Par exemple, à la fin du XIXe siècle, de nombreux mouvements anticoloniaux naissent aux Moyen-Orient. Initialement panarabes, leurs protestations devinrent progressivement spécifiques à la Palestine. Ce processus, contemporain au détachement de la Palestine du Bilad-al-Cham, trouva son paroxysme lors du soulèvement nationaliste palestinien de 1936-1938.

Dirigé principalement par la famille du grand mufti de Jérusalem al-Husseini, le nationalisme palestinien s’est construit en réaction à l’arrivée d’immigrants juifs dès la fin du XIXe siècle. Cette vague migratoire a été d’autant plus massive que la prépondérance de l’antisémitisme en Europe justifiait la réalisation du projet mené par Théodore Herzl : le sionisme. L’absence de structures juridiques encadrant les rapports économiques et sociaux en Palestine avant 1918 a laissé libre cours à la redistribution des anciennes propriétés des notables arabes.

 

En l’espace d’un siècle, les décisions politiques contradictoires et frustrantes pour les parties en présence, ont contribué à l’émergence de deux communautés distinctes, quasiment autonomes l’une par rapport à l’autre économiquement et politiquement, aux revendications et intérêts antagonistes. L’oubli des réalités historiques et géopolitiques a accéléré un engrenage conflictuel où les deux camps se rejettent incessamment la faute. L’émergence d’idéologies extrémistes a accompagné cette spéciation. La naissance du Hamas en 1987, au début de la première Intifada, puis ses succès électoraux, sont les preuves de la montée de l’islam politique au sein des populations musulmanes. L’assassinat d’Itzhak Rabbin en novembre 1995 par Yigal Amir, partisan de la cause sioniste religieuse témoigne de la manifestation du radicalisme sioniste.

Si le gouvernement israélien proclamait ouvertement son hostilité à l’égard du peuple palestinien voire le méprisait- les propos de juin 1969 de Golda Meir l’attestent- la présence d’une force terroriste et néfaste a légitimé voire renforcé la répression jusque-là opérée. D’abord incarnée par le Fatah, la lutte armée palestinienne fut à partir des accords d’Oslo symbolisée par le Hamas, après l’abandon par Yasser Arafat du recours aux armes. Cette radicalisation s’est concrétisée en réaction à des des actes politiques israéliens forts, tels que la fermeture des universités en Cisjordanie à partir de septembre 2000. Celle-ci, puis la dissolution des conseils universitaires principalement dirigés par des sympathisants des partis islamistes ont encouragé la radicalisation des étudiants palestiniens. Paradoxalement, ce sont ces actes visant initialement à réprimer les mouvements extrémistes qui ont induit un regain de haine au sein de la population cisjordanienne .

Aujourd’hui, alors que les deux camps se renvoient constamment la responsabilité, se réfugiant le plus souvent derrière la légitime défense, les agressions réciproques se réitèrent fréquemment. Si l’aveuglement du Hamas face à la réalité juridique qu’est l’Etat d’Israël entrave tout le processus d’entente, l’entêtement d’un gouvernement israélien s’alliant avec l’extrême droite révisionniste rend les négociations d’autant moins possibles.

Aux questions liées à la reconnaissance d’un Etat palestinien à majorité sunnite s’agrègent des conflits d’intérêts, économiques tout comme politiques et des états d’âme archaïques. L’existence de débats internes à Israël est la manifestation de divergences d’opinion à l’égard de la politique actuellement menée en Judée-Samarie et à Gaza. La percée de la droite révisionniste en mai 2015, aux élections provoquées par Netanyahou, a pu être perçue comme un pas de plus vers l’institutionnalisation des idées de Jabotinsky, et comme un danger pour la paix. Le refus formulé par le Premier Ministre israélien semble confirmer cette perspective.

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