Vers la fin du Kirchnérisme en Argentine ?

Ce jeudi 10 décembre marque un tournant historique en Argentine : la fin de la dynastie Kirchner. C’est aujourd’hui qu’a lieu la passation de pouvoir entre l’ancienne présidente Cristina Kirchner et Mauricio Macri, libéral fraichement élu. Elle met fin à douze ans de présidence de la famille Kirchner, Cristina (au pouvoir depuis 2007) ayant succédé à son mari Nestor (président de 2003 à 2007). Mais peut-on réellement parler de fin du kirchnérisme ? C’est ce que La Plume va essayer de comprendre pour toi !

Qu’est ce que le kirchnérisme ?

Plus qu’un simple parti, le kirchnérisme, du nom de ses fondateurs, est une idéologie populiste issue du péronisme, mouvement politique argentin. Alors que le péronisme a la particularité d’avoir compté des membres d’horizons politiques très différents, allant de l’extrême droite à l’extrême gauche, le kirchnérisme s’inscrit dans une orientation plus socialiste. Il donne une importance particulière à l’intervention de l’Etat avec notamment les nationalisations de grandes entreprises, d’importantes aides sociales, un fort protectionnisme…

Incarné par Nestor et Cristina Kirchner, il a été vu par beaucoup comme la solution pour sortir de la grave crise économique et sociale qui a touché l’Argentine en 2001. Il a en effet permis de relancer l’activité économique, qui a alors connu une croissance de l’ordre de 50% en cinq ans, même si l’exactitude des chiffres avancés par le gouvernement reste contestée.

La croissance a aujourd’hui laissé la place à un retour de la récession et de l’inflation, qui incite certains à douter du bilan si positif dressé par les dernières présidences. La grande question est de savoir si le kirchnérisme peut survivre sans un membre de la famille Kirchner au pouvoir, mais surtout si les Argentins ont envie de le voir survivre. Sur ce point, les Argentins semblent divisés.

Une partie des Argentins a envie de tourner la page…

Une des principales raisons de la victoire, le 22 novembre dernier de Mauricio Macri face à son adversaire Daniel Scioli, semble être l’envie de renouveau par rapport à la politique menée par la famille Kirchner. Si Daniel Scioli, soutenu par coalition de gauche et poulain de la présidente sortante, était annoncé grand favori de ces élections ; les scrutins ont finalement prouvé le contraire.

Mauricio Macri , de son côté, a promis « un changement d’époque », annonçant une rupture idéologique avec la politique de ses prédécesseurs. Ce changement, Daniel Scoli aussi voulait l’incarner, mais il a été piégé par sa proximité avec la famille Kirchner. Les électeurs n’ont pas oublié sa place de vice-président de Nestor Kirchner, ni le soutien accordé par la présidente sortante, qui lui a même imposé son vice-président. Cela aura suffit à lui faire perdre sa supposée avance sur son concurrent.

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Le couple Kirchner, Buenos Aires en 2008

… Quand l’autre ne semble pas prête à renoncer au kirchnérisme

Avec plus de 50% d’opinions favorables, Cristina Kirchner quitte pourtant le pouvoir soutenu par une bonne partie des Argentins. Dans une interview réalisée par le site La Presse, un employé de banque parle d’« une femme courageuse qui a amélioré nos conditions de vie et défendu les véritables intérêts du pays ». Il ajoute « On l’aime. ». Certains évoquent même un possible retour de cette dernière au pouvoir en 2019, la Constitution l’empêchant de se représenter cette année puisqu’elle a déjà réalisé deux mandats successifs. Les fervents défenseurs du couple Kirchner restent nombreux, considérant que leur successeur doit s’inscrire dans la continuité de leurs actions politiques qui ont permis de redresser le pays. Parmi eux les jeunes sont très présents, notamment à travers le mouvement politique La Campora, crée en 2006 par Maximo Kirchner, le fils du couple présidentiel, pour soutenir ses parents. L’organisation, qui regroupe des jeunes militants à travers tout le pays, permet à l’ex-présidente d’assurer la continuité du kirchnérisme au sein de la société et de la jeunesse ; les 18-29 ans représentant 25% de l’électorat argentin.

La rupture entre pro-kirchnéristes et anti-kirchnéristes témoigne d’une forte division au sein de la société argentine, qui vient s’ajouter à de graves difficultés économiques. C’est une lourde tache qui attend le président tout juste élu : celle de redresser l’économie, au bord de la récession, après dix années de forte croissance. « C’est tout le pays qu’il faut remettre sur pied. Une tâche terriblement dure attend le prochain président », témoigne un avocat d’affaire argentin interviewé par Les Echos. Mauricio Macri a de son côté promis une rupture franche avec la politique protectionniste menée par les gouvernements Kirchner. Mais ce ne sera pas aisé à mettre en place, son parti n’ayant la majorité dans aucune des deux Chambres. Il se verra donc obligé de tisser des alliances pour gouverner, et de faire des compromis ; preuve que le kirchnérisme est loin d’avoir quitté le pouvoir avec la famille Kirchner.

 

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