Le basket a beau être attractif, c’est encore la même rengaine. Le championnat de France de basket ne trouve pas de diffuseur. Et oui, le 1er octobre, le Betclic Elite a repris la compétition, sans qu’un écran de télévision ne se tourne vers l’évènement. Modèle économique décrié, heures de programmations non avantageuses ou sport pas assez « bankables », les diffuseurs et les ayants-droit se renvoient la balle. Invitée lors d’une conférence au Festival Médias en Seine en fin d’année, Thierry Boudard, PDG de Sportall, Julien Millereux, directeur des sports au service TF1 et Jérôme Saportio, directeur du pôle TV à l’Équipe étaient présents à la table ronde.
« Certains sports n’arrivent pas à émerger à cause de la guerre des droits du sport. C’est le cas du basket », explique Julien Millereux, directeur des sports au service TF1 lors de la conférence « Droit du sport : David contre Goliath » du festival Médias en Seine. Et oui, changer de nom n’a pas suffi à la « Betclic Elite » pour éloigner les problèmes de diffusion. Il y a un an, les diffuseurs ne se bousculaient pas devant la compétition. Aujourd’hui, la situation est la même. Et cela, malgré les deux médailles des JO Tokyo et l’engouement des français durant l’été.
Une question de pub et de rythme
Attractif ? Oui, mais pas pour tout le monde. Diffusé jusqu’en 2020 par RMC pour près de 10 millions d’euros par an, le basket français s’était replié l’an dernier sur la chaine L’Equipe… pour 0 million ! « Avec le basket, la compétition commence s’arrête, reprend, puis reprend mais tous les deux jours… Entre le Covid, les grèves lors des play-off et les matchs reportés, c’est un cercle infernal », explique Jérôme Saporito. Ajouté au nombre infini de compétitions différentes, le directeur du pôle TV de l’Équipe est clair : la diffusion des compétitions de basket n’est pas rentable. « On vit de la pub, on ne peut pas se détacher de la programmation ». En comparaison, le biathlon, sport qui ne rassemble pourtant que 500 licenciés, a su créer une narration autour de la compétition. L’agenda est rythmé ce qui permet de diffuser le sport.
Et la programmation, c’est primordial pour les chaînes privées. Sans audience, pas d’annonceur. Sans annonceur, pas d’argent. « On prétend être un pays de sport mais ce n’est pas le cas », ironise Jérôme Saportio. Quand un match de finale de ligue des champions fait 19 millions d’audience en France, en Allemagne c’est 40 millions. Autre problème, l’heure de diffusion des matchs. « Les grandes fédérations ont des considérations internes : les matchs sont à 20H45 au lieu de 21H. En 15 minutes, on perd 2 millions de téléspectateurs » déplore-t-il.
Le passage au tout payant : les parties se renvoient la balle
Le besoin de financement des fédérations - qui ont perdu 30 % de leurs adhérents avec la Covid - a eu raison des matchs diffusés en clair. Sur ce passage au tout payant, ayants-droit et chaînes n’arrêtent pas de se renvoyer la balle. Mais une chose est sûre : « la fin du clair, c’est la fin de la diversité des disciplines à la TV » pour Jérôme Saportio. Et oui, la France est un des pays où l’on paye le plus cher les droits du sport. Pourtant, cela n’empêche pas un certain nombre de disciplines, comme le basket, de disparaître de nos écrans. Au contraire. Mais le problème du manque de diffuseur vient également du public lui-même. Julien Millereux, directeur des sports du groupe TF1 dénonce « l’ombre de la NBA ». Le championnat américain est énormément suivi dans l’hexagone, à n’importe quelle heure du jour et de la nuit… au détriment de son homologue français.
« Les fédérations doivent ouvrir leurs portes, comme en NBA »
S’inspirer de la NBA ? Peut-être une première piste pour le basket français. Julien Millereux insiste : « On a besoin de faire émerger des visages pour attirer les fans et le grand public. Les fédérations doivent ouvrir leurs portes, comme en NBA ». La firme américaine a en effet accepté de mettre des micros dans les vestiaires des joueurs. En France, il est impossible de mettre le moindre micro à un arbitre. Alors les vestiaires… Autre piste, le retour aux moments de diffusion en clair. « Ces matchs agissent comme des bandes-annonces. Plus il y en aura, plus on donnera envie au grand public de s’abonner », insiste Julien. Il balaie du revers de la main les inquiétudes des fédérations : les fans de la première continueront de toute manière à s’abonner. Une chose est certaine : il faudra jouer collectif pour y arriver. Dommage que les principaux concernés, les fédérations, n’aient pas été invités à en discuter.
Salomé Ferraris, M1 journalisme IPJ